PATRIA O MUERTE

Il est difficile d’explorer Cuba sans croiser son visage. Présent à chaque coin de rue, sur des peintures murales, portraits encadrés à l’intérieur des commerces et maisons ou grandes pancartes au bord des routes, Fidel Castro a survécu à la mémoire.

La première photo de Fidel, l’exposant devant un portrait de José Marti ne fera qu’accentuer la sacralisation du rebelle, avec ce jeu de miroir entre les deux portraits offrant une mise en abîme des valeurs du « sauveur ».

Sans jamais ériger une statue à sa gloire, Fidel Castro construira son iconisation grâce à la révolution de 1959 et à une propagande visuelle supportée par des artistes, dessinateurs et photographes cubains liant intrinsèquement la nouvelle idéologie à sa personne. Il apparait souvent sous son célèbre uniforme et avec ou sans sa casquette emblématique comme le sauveur, le libérateur du peuple cubain.

 De ce fait, le nouveau dirigeant apporte à son mouvement révolutionnaire un caractère divin et prophétique au côté du « Che », subtilité qui lui permet de ne pas tomber dans le piège du culte de la personnalité classique et lui permet de renforcer l’affirmation d’un régime au service de son peuple et de maintenir cette flamme de la révolution dans le coeur et l’esprit des cubains.

Aujourd’hui, dans une société cubaine nostalgique de son passé et de ses idoles, incertaine de son futur proche, l’icone de Fidel joue d’autant plus son rôle de liant social et de référentiel auquel se raccrocher. On le garde à proximité, comme l’on mettrait une croix autour de son cou afin de nous protéger d’éventuels maux à venir. 

De ce fait, Fidel a réussi à opérer une transfiguration de sa personne, en passant du leader de chair au protecteur céleste, de l’être physique adulé par sa population à un système de valeurs et de symboles puissants s’étendant comme une chape invisible mais perceptible pour l’ensemble des cubains et à l’international.